Jean-Étienne Despréaux
Romans
Parodie de Roland, en trois actes, en prose et en vaudevilles
Représentée devant leurs Majestés à Marly
le 30 mai 1778, et à Versailles en avril 1780
Ballard
definitacteur, du bel-air dubelair
Personnages dansants et chantants
Premier acte
persliste, Messieurs les Comtes Dasté, d’Avaray, Polastron ; Monsieur le Marquis d’Aumont ; les Sieurs Dossion, Le Doux, Giguet, Ducel Gens de la suite de Romans
Second acte
Maître d’Hôtel : Monsieur le Comte de Grammont
Page : Monsieur le Comte Dasté
persliste, Monsieur le Comte d’Avarat Jardinier
persliste, Monsieur le Marquis d’Aumont Cuisinier
Femme de charge : Demoiselle La Fond
Voisine : Demoiselle Coulon
Jardinière : Demoiselle Muller
Nourrice de la Baronne : Demoiselle Jenny
Troisième acte
Suite de la Folie à cheval
persliste, Monsieur le Marquis d’Aumont, Monsieur le Comte de Grammont, Monsieur le Comte Dasté, Monsieur le Comte d’Avaray, les Sieurs Laval fils, Habraham Premier détachement
Second détachement de la Folie, à cheval sur des balais : Sieurs Le Bel, Guillet, Le Breton, Caster
Brigadier : Monsieur le Comte de Liniers
Trompette : Le Sieur Lambert
Acteurs
persliste, Monsieur le Comte d’Ossun Le chevalier Romans
La baronne de Fière-Antique : Sieur Despréaux
Martin, jeune paysan et amoureux de la Baronne : Monsieur le Comte de Liniers
Goton, femme de chambre et confidente de la Baronne : Demoiselle Rosalie
Ricoffre, officier du régiment du chevalier Romans : Sieur Despréaux
Du Bel-air, ami de Romans : Monsieur le Comte de Grammont
Cassandre, cabaretier-traiteur : Monsieur le Comte de Polastron
Coco, enfant : Sieur Dossion fils
Fifi, enfant : Sieur Pascal
Lili, enfant : Demoiselle
Lolo, enfant : Demoiselle
La Folie : Demoiselle Rosalie
Laquais à livrée du chevalier
Gens de la maison de la Baronne
Suite de la Folie
Romans
Acte i
Le théâtre représente l’appartement de la Baronne.
Scène i
La Baronne de Fière-Antique, Goton
la baronne
Air : Menuet,
Ah ! que mon cœur aujourd’hui sent de peine !
Par l’amour et la fierté,
Il est tourmenté.
En vérité,
Je n’ai dormi de la semaine.
Trop de bonté
Me cause cette peine.
Ce pauvre Martin
Me donne du tintouin,
Et je crains en ce jour
De céder à l’Amour.
En vérité
Cela me donne la migraine,
Trop de bonté
Me cause cette peine.
Je crains, si je veux,
En faire un amoureux.
Ah ! qu’il est dangereux
D’aimer un malheureux.
goton
Air : La Baronne
Mais, mais, Madame,
N’oubliez pas le fier Romans,
Il viendrait vous chanter la gamme.
Vous promettez depuis vingt ans
D’être sa femme.
la baronne
Air : Il a voulu
De ma raison,
Pauvre Goton,
Je ne suis plus maîtresse.
Trouve un moyen,
Car je crains bien
D’avilir ma noblesse.
L’amour en moi fait le lutin,
Nuit et jour je pense à Martin.
De ma raison, etc.
goton
airvide
Dans vos registres
Il faut relire vos titres,
Là vous pourrez voir
Si vous n’allez pas déchoir.
la baronne
Mon père était fils d’un baron
D’un grand nom,
Descendant de Bellérophon.
On le voit dans mon écusson.
Non,
Je suis de trop grande maison.
goton
Bon.
Il faut combattre votre amour par ce moyen-là, l’ancienneté de vos pères doit régler votre conduite. Malgré les propos des poètes qui unissent toujours les sceptres et les houlettes, votre sang ne peut et ne doit s’enflammer qu’à la vue de bons parchemins écrits en gaulois, et même en hébreu. Ainsi doivent être les billets doux de la noblesse. Mais vous, Baronne de Fière-Antique, comment avez-vous pu devenir amoureuse d’un roturier ?
la baronne
Air : Folies d’Espagne
Je suis baronne, et ne suis point bégueule,
Des malheureux je prends toujours pitié.
Sur un chemin, un jour que j’étais seule,
Je vis Martin qui se démit le pied.
Air : Dans un détour
Tout aussitôt,
Sans dire un mot,
Je fis un saut
Et j’y fus bientôt.
Malgré cela
Il roula, là.
Je le vis relever,
Retomber,
Relever,
Retomber.
La douleur
Ou la peur
Sur son front fit monter la sueur.
Je fis
Deux cris.
Qu’avez-vous donc,
Pauvre garçon,
Vous n’êtes pas bien.
Il pâlit et ne dit rien,
Rien.
Air : Quand l’auteur de la nature
Je pris en versant des larmes
Dans ma poche un flacon d’eau des carmes.
Mais je ne sais par quels charmes,
Le flacon
N’avait plus de bouchon.
Air : Dérouillons
Mais par bonheur
Ou par malheur,
J’étais tout près de ma demeure.
Je le soignis,
Je le guéris,
Sans y penser mon cœur fut pris.
Il s’est trouvé que c’était le cousin de mon nourricier, je le logeai chez moi. Mais je vois que je ne le pourrai garder.
goton
Je crois, Madame, Que ce serait le meilleur parti.
la baronne
Tu as raison, moi... renvoyer Martin, je n’en aurai jamais le courage, ou j’en mourrais de douleur.
Air : Ce que je dis est la vérité même
Ne plus le voir, pour mon cœur quel supplice !
Ah ! j’en mourrai je le sens bien.
À mon honneur je dois ce sacrifice.
Martin, ton cœur était fait pour le mien.
Quelquefois, s’il a l’air stupide,
C’est que de moi son cœur est amoureux.
J’aime en lui ce regard timide,
Ce ton tremblant, cet air honteux.
Ne plus le voir, etc.
Donne-lui quelque argent, qu’il parte. Mais le voilà, mettons-nous dans un coin.
Scène ii
Martin seul
martin
Air : La Tourrière
Amour, dis-moi donc par où
Tu t’es fourré dans la tête
De me rendre amoureux fou,
N’ayant pas le premier sou.\indicreprmus Fin
Non, non, non, non, non, non, non.
Madame est sans doute honnête,
Elle est fille d’un baron,
Et je suis pauvre garçon.
Amour, etc.
Air : Toujours, toujours, il est toujours le même
Je la verrai, c’est assez pour ma flamme,
Je sais que c’est mourir à petits feux.
Mais puisque je ne peux
Jamais l’avoir pour femme,
Au moins, c’est un plaisir
De pouvoir la servir.
Je la verrai, c’est assez pour ma flamme.
Scène iii
La Baronne, Goton, Martin
martin
On demande à parler à Madame, de la part de Monsieur le chevalier Romans. Il est bienheureux de pouvoir dire tout ce qu’il pense et d’avoir le moyen de vous faire des présents. Aussi, si jamais vous l’épousez, il sera bien payé.
la baronne
Il n’est pas dit que je l’épouserai, je suis assez fâchée de lui avoir des obligations. Allez, Martin, n’enviez pas son sort.
martin
Il est vrai qu’il ne vous sert que de loin.
la baronne
Il m’ennuie, et je vais retourner seule dans ma terre. Ah çà, Martin, je veux savoir si je peux compter sur votre obéissance.
martin
Pouvez-vous en douter ? mon oncle le fermier est mort, je ne savais où donner de la tête. Je me suis donné une entorse, vous avez eu la bonté de me prendre chez vous, de me guérir...
la baronne
Présentement je vous donne votre congé... partez.
martin
Air : Fière indifférence
Il faut que je meure,
Si chez vous je ne demeure.
Il faut que je meure.
Si je ne suis vos pas,
Ma mort serait certaine,
Si j’avais cette peine.
Mais si je suis vos pas,
Jamais le trépas
Ne me mettra bas,
Je ne le crains pas.
Je sens en moi
Je ne sais quoi
De grandissime,
Qui me ranime\indicreprmus Ces deux vers sont par échos avec l’orchestre.
Oui, oui, céans,
Je vivrais cent ans...
Il faut que je meure,
Si chez vous je ne demeure.
Il faut que je meure
Si je ne vous suis pas.
la baronne
Martin, vous ne devez pas douter que je m’intéresse à vous. Mais pour certaines raisons, il faut que vous me quittiez. J’ai eu soin de vous tout le temps que vous fûtes malade. Présentement cela va bien, cherchez un autre gîte.
martin
Que vous ai-je fait qui ait pu vous déplaire ?
la baronne
Vous ne m’avez jamais déplu, ni ne me déplaisez, ni ne me déplairez, mais partez.
martin, en suivant la Baronne qui se promène autour du théâtre
Air : Lison dormait
Non, non, sans vous je ne peux vivre,
Soyez certaine de cela.
la baronne
Cessez, Martin, de me poursuivre,
Finissez tous ces propos-là.
martin
Je sais que vous êtes Baronne,
Que votre race est de Cognac.
la baronne
Cessez, Martin, tout ce micmac.
Allez vous en, je vous l’ordonne.
ensemble à part., ensemble
Qu’il est affreux,bis
De ne pas dire ce que je veux.
la baronne
Air : Contredanse des oiseaux
Martin, partez.
martin
Vous le voulez ?
la baronne
Montez chez mon secrétaire,
Qu’il vous donne cent écus.
Retournez chez votre père,
Et ne me revoyez plus.
Adieu.
martin
Adieu.
la baronne
Adieu.
martin
Adieu.
la baronne
Allez.
martin
Allons.
la baronne
Partez.
martin
Partons.
la baronne
Martin, partez.
martin
Vous le voulez.
Je ne veux pas vous déplaire,
Mais j’en mourrai de chagrin.
Oui, je vais vous satisfaire,
Vous ne verrez plus Martin.
la baronne, en déclamant
À force de chanter, nous pourrions nous comprendre.
Il est certains discours que je ne dois entendre.
Obéissez, Monsieur, sans demander pourquoi.
Partez, Martin, partez, qu’on sorte de chez moi.
Il sort.
Scène iv
La Baronne, Goton
la baronne
Air : La Romance de Gaviniès
Goton, j’ai banni Martin,
Que cela me fait de chagrin !
Que va-t-il devenir,
Il me fait transir,
Quel déplaisir !
Que sert la noblesse ?
SI l’on est gêné sans cesse,
Il vaut mieux cent fois
D’un bourgeois
Être la nièce.
Goton, j’ai banni Martin, etc.
Air : Une bergère qui sait charmer
Ciel, que de charmes
Sont exilés !
Coulez, mes larmes,
Coulez, coulez.
Oui... non... oui... va le rappeler,
Non... oui... non... il faut le laissez aller.
Ciel, que de charmes
Sont exilés !
Coulez, mes larmes,
Coulez, coulez.
goton
Air : Jardinier, ne vois-tu pas
Pour une dame d’esprit,
Pleurer n’a pas de grâce.
L’amour petit à petit
S’éteint. Le proverbe dit :
Tout passe, tout casse, tout lasse.
À propos, Madame, il y a du monde qui vous attend, faut-il faire entrer ?
la baronne
Je suis bien en train de parler à quelqu’un, voyons qu’est-ce qu’on me veut ? Pendant ce temps, va trouver Martin, et tâche de le consoler.
Scène v
La Baronne, Du Bel-air, six laquais
Marche des laquais
dubelair
Air : L’Insulaire, contredanse
De par le chevalier Romans,
Qui vous fait bien des compliments,
Je vous remets ces girandoles
De la dernière nouveauté.
Ce ne sont point des babioles,
Ça doit avoir beaucoup coûté.
Quand je les vis, j’en fus surpris,
C’est un présent d’un très grand prix.
]
Ce ne sont point des babioles,
C’est un présent d’un très grand prix.
Air : Un soldat, sous un coup funeste
À Romans je dois ma fortune,
Il m’a tiré d’un mauvais pas.
J’étais seul au clair de la lune,
J’avais cinq voleurs sur les bras.
Romans en carrosse,
Heureusement passait par là,
Sans me connaître, il accourt, il les rosse,
De cinq coups il les immola,
La belle action que voilà !
chœur
La belle action que voilà !
dubelair
Depuis cet évènement, nous sommes fort liés ensemble. Je demeure au point du jour, Monsieur Romans m’a chargé en passant de vous remettre ce gage de son amour. J’ai profité de cette occasion pour voir l’objet qu’il aime.
Air : Sous le nom de l’amitié
Sous le nom de l’amitié
Parlant de vous sans cesse,bis
Sous le nom de l’amitié,
On voit que sa tendresse
Se cache de moitié,
Sous le nom,
Sous le nom de l’amitié.bis
Air : Ah ! vous dirai-je, maman
Ne connaissant pas vos traits,
Je vous dirai, je craignais,
Qu’ayant l’âme trop éprise
Il ne fit une sottise.
Mais en voyant vos beaux yeux,
On doit approuver ses feux.
On danse.
la baronne, donnant au laquais pour boire
Tenez, mes amis, rafraichissez-vous à mon intention.
Elle s’en va.
chœur
Air : Un bel oiseau
Il faut célébrer la Baronne.
Puisque pour boire elle nous donne,
Il faut au cabaret prochain,
Le verre en main,
Jusqu’à demain,
Dire en vidant deux cents flacons :
Buvons, camarades, buvons.
On danse.
Il faut que son nom retentisse,
Il faut lui faire un sacrifice,
Il faut à son intention
Ensemble manger un dindon,
En même temps, nous chanterons :
Buvons, camarades, buvons.
Ils sortent.
finacte
Acte ii
Le théâtre représente un jardin, avec un puis dans le fond.
Scène i
Goton, la Baronne
goton
Merluche, le limonadier vient d’apporter ici de l’orgeat et du chocolat. L’un rafraîchit, l’autre échauffe, lequel voulez-vous, Madame ?
la baronne
Le rafraichissement me conviendrait aujourd’hui, mais je ne veux pas déjeuner.
Mineur du Menuet, \provair de Golconde
Mes douleurs....\footnote Les points désignent la quantité de notes qu’il faut laisser passer.
Et mes pleurs.....
goton
Peut-être vont vous donner des vapeurs....
la baronne
Je le crains.....
goton
Je vous plains.....
la baronne
Que son absence augmente mes chagrins !\indicreprmus Fin
Et c’est toi.....
goton
Quoi ! c’est moi ? .....
la baronne
Oui, fallait y courir,
Me désobéir
Plutôt que de me laisser mourir.
goton
Je craignais.....
la baronne
Tu devais.....
Malgré moi faire ce que je voulais.
Mes douleurs, etc.
Majeur
Désigne sa mine.
Qu’on te tambourine.
Obéis, c’est ton devoir.
Préviens mon désespoir.
Je veux, je veux l’avoir.
Quelle faiblesse,
Ou quelle ivresse.
N’y va pas, Goton,
N’y va pas, non, non.
Vas-y, vas, reste, hélas !
N’y vas pas.
Désigne sa mine.
Qu’on la tambourine.
Obéis, c’est ton devoir.
Préviens mon désespoir.
Je veux, je veux l’avoir.
goton
Ah, voilà quelqu’un.
la baronne
Ah ciel ! c’est Romans.
goton
Ce chevalier abandonne toutes ses affaires pour vous voir.
la baronne
Je l’attraperai bien, car je vais me cacher.
Premier dessus de l’air suivant
Il espère vainement,
Vainement il espère,
Il espère vainement
D’être un jour mon amant.
Oui, vainement
Ce chevalier cherche à me plaire,
Il espère vainement,
Très vainement
D’être un jour mon amant.
Scène ii
Romans, Goton, la Baronne
romans
Air : Vive Henri quatre
Bonjour, Madame,
Comment vous portez-vous ?
Mon cœur se pâme,
En voyant vos yeux doux,
Et je sens ma flamme
S’accroître à vos genoux.
Pendant qu’il fait la révérence, et se met à genoux, la Baronne va se cacher. Il cherche de tous les côtés.
Air : Jardinier, ne vois-tu pas
Mais pourquoi donc se cacher ?
Ce tour serait infâme.
Où peut-elle se jucher ?
Je ne sais pas où chercher
Madame, Madame, Madame.
Madame la Baronne de Fière-Antique, où peut-elle être ? L’ingrate ! quel plaisir a-t-elle à me faire enrager, Madame la Baronne de Fière-Antique ?
Même air
Alternativement chantant et parlant.
Mais pourquoi donc se cacher ?
Madame la Baronne de Fière-Antique !
Ce tour serait infâme.
Madame la Baronne de Fière-Antique ?
Où peut-elle se jucher ?
Madame la Baronne de Fière-Antique.
Je ne sais pas où chercher
Madame, Madame, Madame.
Air : Je suis Lindor
Tu sais, Goton, ce que j’ai fait pour elle,
Pour ses procès je me suis endetté,
Ma montre en gage a très souvent été,
Le tout, pourquoi ? pour aider la cruelle.
En voilà la récompense. L’ingrate, elle me méprise.
Air : Quand la mer rouge apparut
Pourquoi faire l’amoureux,
Et perdre la tête ?
Non, je veux ouvrir les yeux.
Ah ! que j’étais bête.
En voyant ce que voilà,
Fiez-vous après cela,
Faites donc la cour,
Faites donc l’amour,
Contez donc,ter
Contez donc fleurettes
À femme coquettes.
Air :
Non, non, non, non, non,bis
Je ne veux plus voir sa beauté funeste.
Oui, oui, oui, oui, oui,bis
Oui, j’y renonce, Amour, je te déteste.
Air : Menuet, deuxième acte de Gluck – d’ Alceste
Je me reconnais, quel plaisir !
Plus aisément je respire.
Je me reconnais, quel plaisir !
En paix, je pourrai dormir,
Ma raison à son tour
Vient de chasser l’Amour.
Je ne suis plus sous son empire.
Je me reconnais, quel plaisir !
Quel plaisir !bis
De sortir, sans rougir,
D’un amour qui m’aurait fait souffrir.
Air : La Lanterne magique, contredanse
Mais je sens ma raison
Qui fait crac,
Et mon cœur reprend son tic tac.
Par quelle inclinaison
Il brûle et devient un tison ?
Comme un moulin
Qui tourne sans fin,
Je suis agité,
De chaque côté,
Par-ci, par-là,
De-çà, de-là.
Je crains, je veux, je ne veux pas. Ah ! ah !
Air : La belle chose que d’être chevalier
Ah ! quelle honte
Pour un preux chevalier,
Qui croit, qui compte
Aller se marier !
Madame de Fière-Antique, inhumaine, quel plaisir avez-vous à me faire chercher ?
Air : Ton humeur est, Catherine
C’est trop outrer la mesure,
C’est avoir trop mauvais cœur.
Vous me payerez cette injure.
Vous outragez mon honneur.
Je vous trouverai, cruelle,
Fussiez-vous dans les enfers.
J’irai vous chercher querelle
Sur votre esprit de travers.
Il sort.
Scène iii
Goton, la Baronne
goton
Monsieur Romans sort d’ici, il vous cherche partout.
la baronne
Qu’il s’arrange, mon cœur est pris pour un autre, c’est par pitié que je ne veux pas le voir. Qu’il tâche de se guérir. Où peut-être Martin ? de quel côté crois-tu qu’on puisse le trouver ?
goton
Romans vous aime tant que vous devriez...
la baronne
Tais-toi ! Parle-moi de Martin, ou laisse-moi chanter.
Goton va s’asseoir sur le bord du puits.
Air : Si jamais je fais un ami,
1
Tout me déplaît dans ces lieux,
Hélas ! je me déplais moi-même.
Je ne sais ce que je veux
Quand je ne vois point ce que j’aime.
Si j’osais, mais je n’ose pas,
J’en ferais mon homme d’affaire.
Ah ! quel embarras
De ne pouvoir pas
Faire ce qu’on voudrait faire !
2
Si ce n’étais les propos
Qu’on pourrait tenir sur mon compte,
Je calmerais tous mes maux,
En le faisant Marquis ou Comte.
Mais on n’en fera point de cas,
Malgré ce que je pourrais faire.
Car voilà l’embarras :
Ne sera-t-il pas
Toujours le fils de son père ?
3
Je voudrais revoir les traits
De l’objet que mon cœur adore.
Je voudrais qu’il fut tout près,
Je voudrais autre chose encore.
Je voudrais, je ne voudrais pas,
Je crains qu’il ne me déshonore.
Ah ! quel embarras
De ne pouvoir pas
Épouser ce qu’on adore !
Scène iv
Martin, la Baronne, Goton
martin, avant de paraître
Air : Ah, quelle douleur
Ah ! ah ! quelle douleur
Pour mon cœur
Qui pétille,
Qui sèche, qui grille !
la baronne
C’est Martin que je viens d’entendre, ma chère Goton. C’est lui, ah !
goton
Mais, Madame, est-ce que vous allez lui parler ?
la baronne
Certainement. Retire-toi... Cachons-nous pour voir par plaisir jusqu’où va son désespoir.
Elle se cache.
Scène v
Martin, la Baronne
martin, se croyant seul
Air : Boire à son tire lire lire
Je prétends au tombeau
Dès aujourd’hui descendre.
Par un chemin nouveau
Je voudrais bien m’y rendre.
Ne rien sentir
Est un plaisir,
Je m’imaginerais dormir.
Mais je veux mourir sans languir
Et sans souffrir.
La mort est un sommeil,
Jamais de mauvais rêve,
Au lieu qu’à mon réveil
Tous les matins j’endêve.
Ne rien sentir
Est un plaisir,
Je m’imaginerais dormir.
Mais je veux mourir sans languir
Et sans souffrir.
Air : Allez-vous-en, gens de la noce
Cela ne serait pas si bête
Pour terminer tous mes ennuis,
Levant les pieds, baissant la tête,
De me jeter au fond du puits.
Oui, oui, c’est dit.bis
Récitatif
Mais sur le bord je veux y laisser mon habit,
Suite de l’air :
Afin que la Baronne apprenne
Où le désespoir m’a réduit.
En ôtant son habit.
Adieu, ma trop belle inhumaine.
la baronne, l’arrêtant
Arrêtez, Martin, quel dépit !
Air : Ton humeur est, Catherine
Mourir est une folie.
martin
Ainsi que vous je le crois.
De vivre j’ai grande envie,
Surtout lorsque je vous vois.
Mon cœur serait sans alarmes
S’il vivait sous votre loi.
Mais si je ne vois vos charmes,
Je ne réponds pas de moi.
la baronne
Air : Vive le pin
Mon ami, conservez vos jours,
Et cessez tous ces sots discours
Qui font le malheur de ma vie.
Vivez, Martin, je vous en prie,
Quand je devrais vous épouser.
martin
Vous permettez, je n’osais proposer...
la baronne
Oui, je le veux, c’est mon envie.
martin
Air : Tous les hommes sont bons
Que mon bonheur est grand !
Quel état différent !
Je m’en sens plus ardent.
Vos beautés,
Vos bontés
Et les feux
De vos yeux,
Belle Baronne,
Rendent mon cœur plus content
Que si l’on m’eût fait présent
D’une couronne.
la baronne
Dépêchons-nous de chanter cela en Dépêchons-nous de chanter cela en \emph duo, et puis vous vous en irez, parce que le chevalier Romans va venir., et puis vous vous en irez, parce que le chevalier Romans va venir.
Duo
deuxcol, \martin
Air : Tous les hommes sont bons
Que mon bonheur est grand !
Quel état différent !
Je m’en sens plus ardent.
Vos beautés,
Vos bontés
Et les feux
De vos yeux,
Belle Baronne,
Rendent mon cœur plus content
Que si l’on m’eût fait présent
D’une couronne.
la baronne
Air : Vive le pin
Mon ami, conservez vos jours,
Et ne pensons plus qu’aux amours
Qui font le bonheur de ma vie.
Vivez, Martin, je vous en prie.
Vivez, vivez pour m’épouser.
Je sais que c’est me singulariser,
Mais je le veux, c’est mon envie.
Martin s’en va après le duo.
Scène vi
La Baronne seule
la baronne
Air : Ça fait toujours plaisir
À Romans je vais feindre
Pour le mieux attraper.
Il pourrait nous atteindre,
Il s’agit d’échapper.
Il ne pourra se plaindre
En se voyant duper.
L’amant qui nous fait craindre
Nous force à le tromper.
Il faut, il faut donc l’occuper,
Afin, afin de décamper.
Scène vii
Romans, la Baronne
romans, en courant
Ah ! je vous tiens, je ne vous lâcherai pas.
Air : Non, non, je ne veux pas rire
Répondez-moi, pourquoi, parlez,
Quand je viens, vous vous en allez ?
Cela n’est pas trop honnête,
Au lieu de me faire fête.
la baronne
Je veux être malhonnête, moi,
Je veux être malhonnête.
romans
Air : Demandez-moi pourquoi
Mais d’où vient ce mépris,
Ne suis-je pas fidèle ?
De mes soins voilà donc le prix,bis
Ah, cruelle ! Ah, cruelle !
Air : Menuet de serinette
Quelle honte ! quelle horreur !
Que n’êtes-vous moins belle !
J’aurais bien moins de douleur,
Sachant que votre cœur
Fut infidèle.
la baronne
Air : Pierrot, sur le bord d’un ruisseau
Nous n’avons jamais fait d’écrits,
Ne suis-je pas de mon cœur la maîtresse ?
romans
Vous me parliez tant d’être unis !
la baronne
Moi ! je n’ai jamais rien promis.
romans
Parbleu, vous êtes bien traîtresse,
D’oser encor tenir ces propos-là !
la baronne
Parlerez-vous sans cesse de cela ?
romans
La froide amante que voilà.
Même air
Ne m’avez-vous pas dit cent fois
Que vous étiez très sensible à ma peine ?
la baronne
C’est pour avoir le ton courtois
Que je dis ce mot quelquefois.
romans
Barbare ! cruelle ! inhumaine !
Vous détester serait tout mon désir.
J’espère un jour pouvoir y parvenir.
la baronne
Ah ! que vous me ferez plaisir.
romans
Air : Sur les gazons
Mon cher bijou,
Oui, je suis fou.
Je chéris le trait qui me blesse,
Ô vous qui causez ma faiblesse !
Est-ce à vous de m’en punir ?
Vous cherchez à sortir,
Vous tournez la tête sans cesse,
Je vois que vous voulez me fuir.
Tâchez d’être un peu moins tigresse,
Ou faites-moi guérir !
La Baronne, sur la fin de cet air, se promène autour du théâtre.
Duo
romans, la suivant
Air : L’Amant frivole et volage
Ô ma belle ! ô ma déesse !
Laissez-moi voir vos appas.
la baronne
M’obséderez-vous sans cesse,
Romans ? Ne me suivez pas !
romans
De vos yeux, le bleu céleste
Est pour moi le paradis.
la baronne
Des fadeurs est-ce le reste ?
romans
Je ne sais ce que je dis.
la baronne
Même air
J’ai des emplettes à faire.
romans
Je vais vous donner le bras.
la baronne
Je retourne dans ma terre.
romans
J’ai mon carrosse là-bas.
la baronne
Ah ! j’oubliais mon notaire.
Cela peut me mener tard,
Trouvez-vous à la barrière
À huit heures moins un quart.
Ils s’en vont.
Scène viii
Goton, Martin, et toute la maison de la Baronne
goton
Air : Gigue,
D’une très grande dame
Martin est le mari.
Son âme
Est toute en flamme,
Son cœur en est ravi.
Chantez, Monsieur, Madame,
Ne faisons tous qu’un cri.
chœur
Chantons, Monsieur, Madame,
Ne faisons tous qu’un cri.
martin
Mineur
En bute, en bute aux fureurs de l’Amour,
En bute, en bute, j’allais perdre le jour.
Le cœur de ma belle
Me voyant fut ému.
Vivez, me dit-elle,
À l’instant j’ai vécu.
Le chœur reprend le majeur.
Scène ix
Les acteurs précédents, la Baronne
la baronne
Air : Pour voir un peu comment ça f’ra
De la ville prenons congé,
Allons-nous-en à la campagne.
Laissons ici le préjugé,
Que l’amour seul nous accompagne.
L’un pour l’autre nous brûlerons,
Partons, Martin, Martin, partons.
Elle sort avec Martin.
chœur, chantant et dansant
Air : Contredanse,
Quel beau jour !
Pour l’amour !
Ah ! .....
Pour l’amour !
Quel beau jour !
Ah ! .....
On danse.
finacte
Acte iii
Le théâtre représente un jardin de cabaret agréable. On voit la table où la Baronne et Martin ont fait la noce, elle n’est pas encore desservie. Il y a des bouteilles et deux verres, leurs noms sont écrits sur une muraille avec du charbon.
Scène i
Romans, Ricoffre
romans
La Baronne m’a donné parole sur les huit heures à la barrière, mais comme j’ai encore une heure à moi, j’entre ici pour me rafraîchir.
Air : Ô, ma tendre musette
Je n’ai plus de tristesse,
Mon bonheur est certain,
De ma belle maîtresse,
Je recevrai la main.
Nous allons vivre ensemble
Comme deux tourtereaux.
Lorsque l’amour assemble,
On ne sent plus ses maux.
ricoffre
Air : Vous avez raison, La Plante
Si vous laissez-là la gloire,
Vous verrez ce qu’on dira.
romans
La gloire est une autre histoire,
Qui ne fait rien à cela.
Et si j’ai bonne mémoire,
Les héros passent tous là.
ricoffre
Air : La Marche des Mousquetaires
Partons, mon colonel.
romans
L’amour m’attend à l’autel.
ricoffre
C’est bien superficiel.
romans
Voilà le bonheur réel.
ricoffre
L’honneur, l’honneur, Monsieur est essentiel,
Partons, mon colonel.
romans
L’amour m’attend à l’autel.
ricoffre
Monsieur, c’est trop casuel,
Vous deviendrez sensuel,
Et jamais immortel.\indicreprmus Fin
romans
Je ne veux pas d’autre conquête.
ricoffre
L’amour va vous perdre la tête.
romans
Ami, tu n’es qu’un trouble fête.
ricoffre
Venez affronter la tempête.
romans
L’amour fait mon bonheur,
Je renonce à l’honneur.
ricoffre
Partons, mon colonel, etc.
romans
Air : Nanon dormait
Dans cet instant,
Tu n’es point nécessaire,
Un confident,
Ici n’a rien à faire.
Tu ne peux que gêner.
Crois-moi, crois-moi, va-t-en tout seul te promener.
Scène ii
Romans seul
romans
Ritournelle très lente
La nuit ne veut pas marcher,
Ni le soleil se coucher.
Je ne les vois point broncher.
Air : Charmante Gabrielle
Qu’elle tarde à paraître,
Soleil hâte ton cours.
Tu ne dois point connaître
L’objet de mes amours.
Le voile du mystère
Doit la cacher,
D’amour seul pour me plaire
Doit l’éclairer.
Cachez votre tendresse,
Amants, masquez vos feux.
Aimer avec adresse
Rend cent fois plus heureux.
l’on est plus sûr de plaire
Étant discret.
Pour jouir, faut se taire,
C’est le secret.
Il se promène.
Ce petit jardin est joliment arrangé, ah ! ce reste de collation, une bouteille, deux verres, font voir qu’il y avait là un tête-à-tête. L’amour se plait aujourd’hui à faire des heureux... Ils ont écrit sur le mur avec du charbon, Il met ses lunettes. voyons par plaisir ce qu’il y a... C’est assez mal écrit. On jurerait que c’est la main de la Baronne.
Il lit.
Fière-Antique engage son cœur,
Martin en est vainqueur.
Martin, Martin, je n’ai jamais entendu parler de ce nom qu’à Montmartre. Martin... Je pourrais m’alarmer si c’était quelques Comtes ou Marquis. Mais Martin... ah ! je suis sûr que c’est un tour qu’elle m’a joué. Elle est venue la première, elle n’aura pas voulu qu’on sache le nom de son bon ami, c’est moi qui suis son cher Martin !
Récitatif
Elle parle de moi sous un nom supposé.
Mais quelle est cette autre écriture, c’est de la bâtarde.
Que Martin est heureux
Fière-Antique a comblé ses vœux.
Ce Martin est un polisson d’avoir écrit cela. La Baronne aurait comblé les vœux d’un Martin ? cela ne peut-être ! c’est une mauvaise plaisanterie qu’on a voulu me faire.
Air : Menuet trompette
Insolent écrivain
Qui signez Martin,
Redoutez ma main,
Tremblez,
Frémissez.
Sauvez-vous
D’un amant jaloux.\indicreprmus Fin
Redoute ma fureur...
Insolent rimailleur...
Tu n’es qu’un imposteur,
N’est-ce pas une vaine frayeur ?
Insolent écrivain, etc.
definitacteur, chœur d’enfants chœurdenfants
chœurdenfants, qu’on ne voit pas
Trois pierres j’en ôterai,
Au gué, au gué, au gué,
Trois pierres j’en ôterai,
Au gué, franc cavalier.
romans
Voilà des enfants qui vont m’ennuyer. Allons sur la porte voir si elle vient. Au doux regard de ma belle, mes soupçons vont s’évanouir.
Il sort.
Scène iii
Lili, Fifi, Coco, Lolo
lili
Coco, Fifi, Lolo.
coco
Que veux-tu Lili ?
lili
Viens donc jouer ici.
coco, lolo, ensemble
Air : Ah, Petit-Jean
Ah l’beau temps qui fait
Pour jouer à la madame,
Ah l’beau temps qui fait
Pour jouer à tout c’qui plait.
lili
Vois-tu, Coco, que j’ai bien fait d’être sage. On m’a donné de la fiture.
coco
Et moi de même j’en ai tout plein, Mademoiselle, aussi.
Air : Il est tout de travers
J’aimerai toujours ma cher’mère,
Ma cousine et mon cousin.
lili
J’aimerai toujours mon cher père,
Ma marraine et mon parrain.
coco
Je ne veux jamais leur déplaire.
Je ferai ce qu’ils diront.
lili
Pour ne pas les mettre en colère,
Je dirai ce qu’ils voudront.
ensemble, ensemble
J’aimerai toujours ma cher’mère,
Ma cousine et mon cousin.
J’aimerai toujours mon cher père,
Ma marraine et mon parrain.
chœurdenfants
Air : Quand j’étais Mousquetaire
Chantons tous la Baronne,
C’est une dame bien bonne.
Elle a dit qu’on nous donne
La tarte que voilà-là là.
Martin, ces bonbons-là.bis
lili
La confiture est bonne,
Ah ! la charmante Baronne !
Scène iv
Romans et les enfants
romans
Vous parlez de la Baronne,
Et vous nommez Martin, in, in.
les enfants, montrant leur tartine
V’la le reste du festin.
les quatre enfants, ensemble
Madame Fière-Antique
Épouse son domestique.
L’aventure est publique,
Elle en fait un seigneur,
Monsieur,
Elle en fait un seigneur.
romans
Majeur
Ah ! je succombe à ma douleur.
lili
Monsieur, avez-vous mal au cœur ?
romans
Non, non, non.
tous les enfants en se sauvant au fond., ensemble
Eh bien donc, eh bien donc, il fait peur !
lili
Mineur
Mais il fait la grimace,
Coco, viens donc voir sa face,
Ah, comme elle est cocasse !
coco
Il est peut-être fou, ou, ou,
Il est peut-être saou...
C’était à cette place.
romans
Air : Justes dieux,
Juste ciel, où me suis-je assis !
Scène v
Cassandre, Romans, enfants
le père cassandre, chante
[bis]
Les voilà partis, les voilà partis.
Tous nos vœux sont remplis.
coco
Sont-ils bien loin ?
le père
Oh oui ! car ils ont pris la diligence.
romans, à part
Ils sont partis. Je n’aurai donc pas seulement le plaisir de la vengeance ?
le père
Voilà ce qu’elle m’a donné pour votre mère.
les enfants
Que c’est beau.
romans
Que vois-je ? les girandoles que je lui ai achetées ce matin !
Non, non, non, non, non,bis
Jamais on eut tant de bassesse.
le père
Quel est ce Monsieur ?
les enfants
Nous ne savons pas, Papa, nous l’avons trouvé ici.
le père
Il a l’air malade, il veut peut-être quelque chose.
les enfants
Papa, ne lui parlez pas, il est de mauvaise humeur.
romans, à part
Que ne puis-je lui arracher le cœur.
le père
Il dit qu’il a mal au cœur, c’est une indigestion.
coco
Vois-tu chose, que je t’avais bien dit qu’il était saou.
le père
Il a meilleur visage, ah cela ne sera rien.
Air : Quand j’étais mousquetaire
Bénissez la Baronne,
La généreuse personne.
Voyez ce qu’elle donne
Pour payer son festin in in,
L’heureux Monsieur Martin !
Le père s’en va. Ils dansent en rond le refrain.
Bénissons la Baronne,
La généreuse personne.
Bénissons la Baronne,
Bénissons son Martin, tin, tin.
romans
Taisez-vous, marmots, avec vos maudites chansons. Rendez grâce à votre petitesse, si vous n’avez pas senti le poids de mon bras. Sauvez-vous, ou je vais prendre une poignée de verges.
les enfants, en courant
Air : Mariez-moi
Sauvons-nous,
Sauvons-nous,
Sauvons-nous
Tous.
Scène vi
Romans seul
romans
air, de l’ancienne Vénitienne
Pour un rien
Je m’arracherais le visage.
Que tout ressente ma rage,
Casser tout me fait du bien.
Renversons cette table.
Il renverse la table.
Abominable.
Que sous l’effort de mon bras, ah !
Tous ces murs soient jetés en bas, ah !
Il démolit le mur.
Au diable tout le festin,
La Fière-Antique et son Martin.
Il déracine des raves, arrache des fleurs, brise des pots de terre, etc.. Après avoir tout cassé, il aperçoit dans un coin une figure d’Amour.
Air : De l’amour tout subit les lois
Traître amour qui fait mon malheur,
Petit gueux qui trahit mon cœur.
Je veux, par une croquignole,
Te prouver quel est ma fureur,
Montrons l’exemple à l’univers.
Que son nez vole dans les airs,
D’une chiquenaude il abat le nez.
Abattons, détruisons l’idole
En cent morceaux divers.
Il brise la statue.
Récitatif
Mes yeux s’obscurcissent,
Mes bras s’appesantissent,
Mes jambes s’engourdissent.
Pour descendre au tombeau,
Que me sert mon chapeau,
Ce n’est qu’un vain fardeau.
Il jette son chapeau, et tombe évanoui.
Air : Pièce de Monsieur Honavre
Je vois les enfers
Là, là, là,
Ils sont entrouverts,
Les voilà,
Quel gouffre effroyable,
J’aperçois le diable,
Ah ! je meurs d’effroi.
Hélas ! il est déjà tout près de moi.
Allez-vous-en, mais ils sont six,
Sept, huit, neuf, dix.
Il se moque et me fait les cornes.
Me prenez-vous pour un bestial ?
Vous mordrez, c’est passer les bornes.
Ah ! Messieurs, vous me faites mal.
Ah........\indicreprmus Reprise
Je ne vois plus rien......
Mais je sens fort bien....
Que l’on m’égratigne.
Messieurs c’est indigne,
Voulez-vous finir.
Holà, holà, vous me faites souffrir.
......
Aïe...
.....
Aïe....
[bis]
Mais, Messieurs les démons,
Finissez vos façons.
Rondeau
Oui, Monsieur démon.....
Vous avez raison......
C’est une sottise,
C’est une bêtise
Que d’être amoureux.
Il vaut cent fois mieux brûler dans vos feux.
..........
........
[bis]
Je sais que je suis fou,
Rentrez dans votre trou.
Il tombe évanoui.
Scène vii
La Folie et sa suite arrivent à cheval et dansent autour du théâtre
la folie
Air : Amour, Amour, achève ton ouvrage
Amour, amour, voilà donc ton ouvrage,
Voilà l’effet de ton poison.
Suis-moi, Romans, reprends courage,
Viens commander mon escadron.
Viens triompher, viens, je suis la Folie,
Viens à la tête de mes fous.
Avec plaisir risquant ta vie,
Tu te rendras digne de nous.
Air : Eh quoi, tout sommeille
Sonnez dans l’oreille
Afin qu’il s’éveille,
Faites grand bruit,
Ranimez son esprit.
chœur
Sonnons dans l’oreille
Afin qu’il s’éveille,
Faisons grand bruit,
Ranimons son esprit.
la folie
Pauvre garçon,
Tu n’as plus de raison,
Te voilà des plus fous,
Viens donc loger chez nous.
C’est bagatelle
D’être sans cervelle.
Notre désespoir
Serait d’en avoir.
Sonnez dans l’oreille
Afin qu’il s’éveille,
Faites grand bruit,
Ranimez son esprit.
chœur
Sonnons dans l’oreille, etc.
romans
Air : Menuet de la chasse
Grand dieu, dans quel état je me trouve et me vois !
Je n’en puis plus, ah ! je suis aux abois.
Quelle honte pour moi de ternir mes exploits,
Je n’en puis plus, ah ! je suis aux abois.
Il s’endort.
la folie
Tirez-lui l’oreille
Afin qu’il s’éveille,
Faites grand bruit,
Ranimez son esprit.
definitacteur, chœur de la folie chœurdelafolie
chœurdelafolie, en caracolant
Tirons-lui l’oreille
Afin qu’il s’éveille,
Faisons grand bruit,
Ranimons son esprit.
Air : Fleuve d’oubli
coupletvaud 0
4
romans, se lève
Que voulez-vous, la belle,
Je ne vous connais pas.
chœur
Ah ! ah ! ah !
la folie
Je suis la Demoiselle
Qui conduit les combats.
chœur
Ah ! ah ! ah !
la folie
Des héros, je suis la Reine.
Pour un oui, pour un non,
Sans raison
Je dégaine, je dégaine, je dégaine.
5
romans
Je vous croyais la Gloire,
Car vous lui ressemblez.
chœur
Eh ! eh ! eh !
la folie
Par là j’en fais accroire.
Les fous y sont trompés.
chœur
Eh ! eh ! eh !
la folie
Pour un rien ils se déchainent,
Pour un oui, pour un non,
Sans raison
Ils dégainent, ils dégainent, ils dégainent.
6
J’aime les balourdises
Que font tous mes amis.
chœur
Hi ! hi ! hi !
la folie
J’approuve leurs sottises,
En cachette j’en ris.
chœur
Hi ! hi ! hi !
la folie
Dans l’embarras je les traine,
Et puis quand ils sont là
Je m’en va.
Ils dégainent, je rengaine, je rengaine.
7
romans
Allez-vous-en, Madame,
Décampez tout d’un saut.
chœur
Ô, ô, ô.
romans
Redoutez cette lame,
Un, deux, il y fait chaud.
chœur
Ô, ô, ô.
romans
Croyez-vous donc qu’on me mène
Par le nez comme un sot ?
Vite et tôt
Qu’on se sauve, ou qu’on dégaine, qu’on dégaine.
8
la folie
Bravo, Romans, courage,
Tu n’es point abattu.
chœur
Tu, tu, tu.
la folie
J’aime à voir cette rage
Qu’on appelle vertu.
chœur
Tu, tu, tu.
la folie
Sur un cheval qu’on le mène
À la tête des fous
De chez nous.
Qu’il dégaine, qu’il dégaine, qu’il dégaine.
La suite de la Folie amène un cheval à Romans, qui danse un pas de deux avec la Folie.
romans, à cheval
Air : Anglaise,
Allons mes amis
Contre les ennemis.
Que sous notre bras
Ils trouvent le trépas.
chœur
Allons mes amis, etc.
romans
L’épée à la main
Cherchons notre destin,
Au diable l’amour,
J’y renonce en ce jour.
chœur
L’épée à la main, etc.
La suite de la Folie danse une contredanse à cheval. Romans et la Folie se mettent à la tête et les emmènent.
Fin