Hercule filant

Auteurs : Fuzelier (Louis)
Parodie de : Omphale de La Motte et Destouches
Date: 15 mai 1721
Représentation : 15 mai 1721 Comédie-Italienne - Hôtel de Bourgogne
Source : Les Parodies du Nouveau Théâtre-Italien, t. I, Paris, Briasson, 1731
Louis Fuzelier

Hercule filant


Comédie
Représentée pour la première fois, par les Comédiens Italiens ordinaires du Roi
le jeudi 15 Mai 1721
Les Parodies du nouveau Théâtre-Italien, Briasson, 1738, t. II

Acteurs


Omphale, reine de Lydie
Hercule
Iphis
Argine
Première Commère
Seconde Commère
Troisième Commère
Quatrième Commère
Démons en Zéphyrs
Démons
Revendeuses à la Toilette, chantant
Bouquetières
Commères, dansant avec des quenouilles
La scène est à Sardis, capitale de Lydie.

Hercule filant


\prologue[Trivelin, Marioen bourgeois, rabat, manteau et perruque carrée, représentant un connaisseur.]
Trivelin passe au fond du théâtre à demi habillé.
le connaisseur

Hola, Monsieur Trivelin, un petit mot, s’il vous plaît.


trivelin

Eh ! Monsieur, de grâce, permettez que j’achève de m’habiller. Le public...


le connaisseur

Le public est instruit du respect qu’il me doit ; il ne soufflera pas quand il saura que c’est moi qui vous arrête.


trivelin

Eh ! Qui êtes-vous, Monsieur, vous que le public respecte ?


le connaisseur

Je suis un connaisseur.


trivelin

Un connaisseur, vous !


le connaisseur

Oui, moi.


trivelin, à part, le considérant

Je le prenais, ma foi, pour un juré-crieur.


le connaisseur

Vous voyez la crème de tous les connaisseurs de Paris, gourmet en vers, gourmet en prose, il n’est point d’ouvrage qui trompe mon discernement.


trivelin, à part

Quelle modestie !


le connaisseur

Ho çà, dites-moi un peu, Monsieur Trivelin, votre Ho çà, dites-moi un peu, Monsieur Trivelin, votre \emph Hercule Filant est, je gage, une parodie de l’opéra d’\emph Omphale..


trivelin

Vous pouvez gager, vous ne perdrez pas.


le connaisseur

Vous allez nous servir un pot-pourri de Vous allez nous servir un pot-pourri de \emph Vous m’entendez bien, de \emph Flon, flon......


trivelin

Assurément ; croyez-vous qu’il serait décent de parodier un opéra sans y fourrer des Assurément ; croyez-vous qu’il serait décent de parodier un opéra sans y fourrer des \emph Flon, flon ? N’est-ce pas là leur place ? ? N’est-ce pas là leur place ?


le connaisseur

Eh, morbleu, laissez à la Foire le soin de ridiculiser les héros en bémol, c’est là son métier.


trivelin

Tout beau, Monsieur le connaisseur, lisez les annales de la Comédie Italienne, vous verrez que nos ancêtres comiques ont chanté d’après les Dumesnils et les Beaumavieles : ne devez-vous pas savoir qu’Tout beau, Monsieur le connaisseur, lisez les annales de la Comédie Italienne, vous verrez que nos ancêtres comiques ont chanté d’après les Dumesnils et les Beaumavieles : ne devez-vous pas savoir qu’\emph Armide, ce chef-d’œuvre du fameux Lully, a été fredonné par un gosier arlequinique ? Avez-vous oublié ? \did Il chante.


Air : Plus j’observe ces lieux, et plus je les admire

Voir la partition
Informations sur cet air

Plus j’observe ce rôt, et plus je le désire,
La broche tourne lentement.
le connaisseur

Il faut l’avouer, on a vu jadis avec plaisir Il faut l’avouer, on a vu jadis avec plaisir \emph Arlequin Phaéton, \emph Arlequin Persée, \emph Arlequin Jason ; mais alors vos acteurs chantaient, et n’étaient pas, comme vous autres, terriblement brouillés avec la musique. ; mais alors vos acteurs chantaient, et n’étaient pas, comme vous autres, terriblement brouillés avec la musique.


trivelin

Voilà une réflexion qui est assez judicieuse. Cependant, comment voulez-vous que nous fassions ? La tragédie française reçoit dans la parodie un comique qui peut être rendu par la déclamation, mais le poème lyrique ne peut se présenter sur le théâtre de la Comédie Italienne sans le passeport du vaudeville.


le connaisseur

Mais vous chantez faux.


trivelin

C’est là le plus beau de nos privilèges, et il semble quelquefois que l’Opéra ait envie de nous le revendiquer.


le connaisseur

Je parierais qu’Arlequin n’est pas employé dans ce bel ouvrage-là.


trivelin

Oh ! Pour le coup vous perdriez la gageure.


le connaisseur

Que diable peut représenter dans la parodie d’Que diable peut représenter dans la parodie d’\emph Omphale, un Arlequin balourd ?, un Arlequin balourd ?


trivelin

Eh ! Parbleu, un personnage balourd, il y en a à choisir dans cet opéra-ci.


le connaisseur

À quel rôle Arlequin a-t-il donné la préférence ?


trivelin

Au rôle d’Iphis, en considération de la poltronnerie de ce héros...


le connaisseur

Oui-da, Arlequin Iphis, cela est assorti, cela ne tranche point ; mais Hercule, qui de vous autres le représente ? C’est un rôle bien enrhumant.


trivelin

Oh ! j’ai une voix que les rhumes ne sauraient gâter.


le connaisseur

Allez, Monsieur Hercule, allez à votre toilette, je ne vous retiens plus ; chantez, glapissez, hurlez, je vous promets d’entendre patiemment votre burlesque concert.


trivelin

Ce n’est pas assez pour le tranquilliser notre discordant concert ; nous prions très humblement le parterre de n’y pas venir chanter sa partie.


finprologue

Hercule filant

Le théâtre représente la salle à manger du palais d’Omphale.

Scène i

Iphis seul

iphis

Me voilà dans la salle à manger du palais d’Omphale, et cependant je m’ennuie ! Se peut-il que le chagrin vienne surprendre Iphis dans une salle à manger ?... Oui, car j’aime la Reine comme un perdu... La belle occupation pour l’apprenti d’Hercule !... Hercule étant encore en nourrice tua deux gros serpents, et moi qui suis sevré depuis vingt-cinq ans au moins, je n’ai pas écrasé un petit ver de terre.


Les violons jouent les deux premiers vers de l’air que chante Iphis qui se promène dans le goût des héros de l’Opéra.

Air : Mon père, je viens devant vous

Voir la partition
Informations sur cet air

Calme heureux, agréable paix,
C’est en vain que je vous rappelle...
Apercevant Hercule.

Mais j’aperçois mon maître Hercule... comme il est équipé !


Scène ii

Iphis, Hercule avec sa peau de lion, une quenouille et un fuseau

hercule

Ouf, ouf, Ouf, ouf, \emph terque, \emph quaterque, ouf., ouf.


iphis

Air : Turelonton ton


Quoi, vous boudez au sein de la victoire,
Et votre cœur pousse de longs soupirs ?
Vous ne sauriez désirer plus de gloire.
Quel autre bien fait naître vos désirs ?
hercule
Tonrelon ton, ton
Tu l’entends qui soupire,
Tonrelon ton, ton,
Mon petit cœur mignon.

Mon cher Iphis, je suis fou de la Reine.


iphis

De la Reine !


hercule

Air : Lanturlu

Voir la partition
Informations sur cet air

Omphale est pouponne,
Elle a de beaux yeux ;
Sa taille est friponne,
Son port gracieux,
Tout du long de l’aune,
On m’en a donné, vois-tu ?
iphis, à part
Je suis rendu, je suis perdu,
Je suis... je suis parbleu tondu.
À Hercule.

Et Madame Argine, oubliez-vous qu’elle vous aime, et qu’elle en sait plus que feue la Jobin ?


hercule

Ne me parle point de cette sorcière-là.


Il chante en filant.

Air : Il faut que je file file

Voir la partition
Informations sur cet air

Il faut que je file file,
Ou de la laine ou du lin.
iphis

Eh ! pourquoi, s’il vous plaît, faut-il que vous filiez ?


hercule

C’est qu’Omphale est bonne ménagère ; elle aime les profits de la quenouille, et moi pour lui plaire, Il chante en filant, sur l’air précédent.


Il faut que je file, file,
Ou de la laine ou du lin.
iphis

Vous ne filez point à l’Opéra.


hercule

La belle autorité ! L’Opéra n’est qu’un ignorant, qui chante toujours la même chanson. Sait-il caractériser les héros ? Il habille leurs pensées comme leurs personnes, de clinquant et d’oripeau. Crois-moi, mon ami, ne t’en rapporte jamais à l’Opéra, sur le chapitre des aventures des grands hommes.


Air : Que je chéris mon cher voisin

Voir la partition
Informations sur cet air

Il aime, ce compère-là,
À nous en faire accroire :
iphis
Je vois fort bien que l’Opéra
Gâte souvent l’histoire
hercule

Viens, mon cher Iphis, je veux préparer à la Reine une fête qui sûrement sera de son goût... À propos de fête, c’est aujourd’hui celle d’Omphale.


Air : Ces filles sont si sottes

Voir la partition
Informations sur cet air

Il faut danser, il faut chanter,
Il faut que j’aille présenter
Un bouquet à la Reine.
iphis
Vous sentez-vous en belle humeur ?
hercule
Tes demandes sont sottes, lon la,
Tes demandes sont sottes.
iphis

La Reine vous payera-t-elle la fête ?


hercule

Autre question ! Passez, Monsieur le curieux, passez.


Il fait passer Iphis devant lui, et rentre.

Scène iii

Omphale, première commère, seconde commère

omphale

Hercule ne m’a pas aperçue, quel bonheur !


seconde commère

Vous paraissez éviter Hercule, cependant il vous adore.


première commère

Air : Ton humeur est Catherine

Voir la partition
Informations sur cet air

Jamais d’un feu plus sincère,
Un cœur ne s’est vu brûler ;
Et ce héros pour vous plaire,
Veut bien apprendre à filer.
omphale
Il fait là de bel ouvrage !
C’est le phénix des lourdauds ;
Déjà son apprentissage
M’a coûté trente fuseaux.
seconde commère

Oh ! le maladroit.


omphale

Air : Non, non, il n’est point de si joli nom

Voir la partition
Informations sur cet air

Un Suisse aurait plus d’adresse
Que le fils de Jupiter ;
Ma quenouille est toute en pièces,
Il a des pattes de fer.
Non, non, il n’est point aux champs de Marion,
Qui ne file mieux qu’Hercule ;
Non, non, il n’est point aux champs de Marion,
Qui ne lui dame le pion.
première commère

Air : Vous m’entendez bien

Voir la partition
Écouter (midi) Voir la partition Informations sur cet air

Puisque le fils du grand Jupin
Vous paraît lourd, votre goût fin
A fait la découverte...
omphale
Eh bien ?
première commère
D’un fileur plus alerte,
Vous m’entendez bien.
seconde commère

Je devine moi, que c’est le menin d’Hercule, le brunet Iphis.


omphale
En devinant mon choix, vous le justifiez.
seconde commère

Eh pourquoi tant tourner autour du pot ; que ne vous expliquez-vous à la franquette ?


omphale, chante

Air : À l’ombre d’un ormeau, Lisette

Voir la partition
Informations sur cet air

À l’ombre d’un ormeau, seulette,
Filant mon lin tranquillement,
Iphis vient danser sur l’herbette,
Qu’il se trémousse gentiment !
Il a mille agréments,
Dans tous ses mouvements.

Il vient !


Air :


Qu’il est poli !
Qu’il est joli !
première commère
Vous en tenez Omphale,
Voyez s’il en tient, lui.

Scène iv

Omphale, Iphis

iphis, à part, sans voir Omphale

Que fais-je, malheureux ! J’ose aller sur les brisées d’Hercule. Il est mon ami, et même un peu mon maître : que ferais-je, moi franche mazette, contre un rival robuste qui assomme les lions à coups de poings ; qui rosse les géants comme des Pygmées ; qui étrille les centaures comme les baudets ; enfin qui est si fort, si fort, qu’il a balayé lui seul des étables qui avaient fait bouquer tous les bouviers du bon roi Augias ?


omphale

Il rêve, il ne sait pas encore l’amour qu’il a fait naître ; il faut que je l’intrigue : la pièce serait trop tôt finie si mon cœur s’expliquait sans finasser.


iphis, à part

Quelle cruelle situation ! mon cœur me dit de parler, mes épaules me le défendent. Il aperçoit Omphale.


Air : Talaleri, talaleri, talalerire

Voir la partition
Informations sur cet air

Jouissez de votre conquête,
Votre destin est assez doux :
Je viens vous annoncer la fête
Qu’Hercule prépare pour vous.
omphale
Ma foi, c’est en vain qu’il soupire.
Talaleri, talaleri, talalerire.

Un autre amant a prévenu ce héros dans mon cœur.


iphis

Air : L’amour, la nuit et le jour

Voir la partition
Informations sur cet air

Ô Ciel ! quel autre amant,
Mérite de vous plaire ?
Hercule seulement
Est digne de vous faire
L’amour
La nuit et le jour.
omphale

Ne savez-vous qu’Hercule qui puisse charmer une Reine de bon goût ? Elle chante.


Air : Ah mon Dieu ! que de belles dames

Voir la partition
Informations sur cet air

Ah mon Dieu ! que de jolis hommes
Que l’on voit ici.
iphis

J’y suis tout seul, vous n’y pensez pas. À part. Omphale a des visions, je la crois lunatique.


omphale, à part

Le petit butor ! il ne m’entend pas. Haut. Iphis a la conception dure.


iphis

Croyez-moi, tenez-vous-en à mon ami Hercule, vous savez que parmi ses travaux, il y en a qui doivent le mettre en crédit auprès des dames.


omphale

Air : O reguingué

Voir la partition
Informations sur cet air

Je sais qu’Hercule est fort vanté ;
Ma gouvernante m’a conté,
O reguigué, o lon lan la,
Que par lui cinquante pucelles
Ont cessé d’être demoiselles.
iphis

Il en a fait des dames damées, et cela en une nuit au moins : Madame la Reine, ce ne sont pas là des jeux d’enfant...


omphale

Il soutient mal sa réputation dans ma cour ; mais laissons-là ce fileur nouveau.


Air : On n’aime plus dans nos forêts

Voir la partition
Informations sur cet air

L’amant que m’offrent les Amours,
Méritait le mieux cette gloire ;
Mes yeux me le disent toujours
Et mon cœur se plaît à les croire.
iphis, pleurant
Vos yeux et votre cœur ont tort.
omphale
De quoi pleurez-vous donc si fort ?
iphis

Je pleure pour Hercule.


omphale, à part

Air : Je suis la fleur des garçons du village

Voir la partition
Informations sur cet air

Quel zèle sot !
À Iphis.
Oh ! j’admire sans cesse,
L’amitié d’Hercule et d’Iphis,
On n’a jamais vu former dans la Grèce
Des nœuds aussi mal assortis.
iphis

Air : Guillot est mon ami

Voir la partition
Informations sur cet air

Hercule est mon ami,
Quoique le monde en raille,
Il n’est point endormi,
Lorsqu’il faut qu’il travaille.
omphale, d’un air de dédain
Je ne vois rien en lui
Qui, qui, qui ne déplaise...
iphis

Air : Tu croyais en aimant Colette

Voir la partition
Informations sur cet air

Ah ! c’est trop m’accabler, cruelle !
Mon cœur éprouve en ce moment...
La douleur d’un ami fidèle
Et d’un trop malheureux amant.
omphale

Que dites-vous Iphis ?


iphis

Air : Réveillez-vous, belle endormie

Voir la partition
Informations sur cet air

Je dis que ma peine mortelle,
S’en va me coûter un licou,
Hercule fait de la ficelle,
Il m’en donnera pour un sou.

Il vient fort à propos.


Scène v

Omphale, Iphis, Hercule, commères fileuses

iphis, à Hercule filant

Avez-vous de la corde de faite ?


hercule

Tais-toi, mon cher ami. Avancez, dame Jeanne, dame Ragonde, dame Perrette, dame Françoise.


Les fileuses avancent.
iphis

Que de belles dames !


omphale

Quelle cohue est-ce là ?


hercule

Ce sont les plus habiles fileuses du quartier que j’ai rassemblées pour vous donner une fête qui vous convienne.


omphale

Air : Vous avez raison, La Plante

Voir la partition
Informations sur cet air

Vous avez raison, Hercule,
J’aime mieux tout ce train-là
Larira,
Qu’un triomphe ridicule\footnote Divertissement du premier acte d’Omphale.,
Plus trivial que cela
Larira.
Vous avez raison, Hercule,
Il est bon sur ce ton-là.
hercule

Ces commères vous apprendront si vous voulez, bien des chansons à danser.


omphale

Oui-da.


hercule

Air : Réveillez-vous, belle endormie

Voir la partition
Informations sur cet air

J’ai cru que les chansons des rues
Vous ennuieraient moins promptement,
Que des louanges rebattues,
Que l’on retourne à tout moment.
Hercule, Omphale, et toutes les fileuses se rangent autour de la salle.
hercule, à une fileuse

Allons dame Jacqueline, chantez-nous les amours de Gombaut et de Macé.


On entend le prélude de l’opéra qui annonce Argine avec le tonnerre et les éclairs.

Voici bien une autre chanson !


Scène vi

Hercule, Omphale, Iphis, les fileuses, Argine

La symphonie continue avec le tonnerre et les éclairs, et on chante le vaudeville Oh, oh, tourelouribo, entremêlé de la symphonie de l’opéra d’\emph Omphale, acte second, où sont ces paroles : \guill Quel trouble, quelle horreur soudaine.
Omphale, Hercule et le Chœur, ensemble

Air : Oh, Oh, tourelouribo

Voir la partition
Informations sur cet air

Ah ! quel carillon, quelle horreur soudaine !
Oh ! Oh !
Tourelouribo.
L’enfer contre nous se déchaîne,
Oh ! Oh !
Tourelouribo ;
Le diable là-haut se promène,
Oh ! Oh ! Oh !
Tourelouribo.
Argine paraît en l’air sur un manche à balai sellé et bridé.
hercule

Air : Mon père, je viens devant vous

Voir la partition
Informations sur cet air

Que vois-je ! c’est Argine, ô dieux !
Que je crains sa jalouse rage !
iphis
Quel monstre l’amène en ces lieux ?
C’est un manche à balai sauvage...

Oh, le vilain bidet !


Fuyons ! je n’aimerais pas trop
Qu’il vint sur mon dos au galop.
Argine descend avec un flambeau allumé, et met le feu à toutes les quenouilles des fileuses qui s’enfuient.
hercule, riant

Voilà ce qui s’appelle mettre le feu aux étoupes. La belle vengeance !


Scène vii

Argine, Hercule

argine

Vous n’y êtes pas, Monsieur le rieur, vous en verrez bien d’autres.


hercule

Peste !


argine

Ingrat ! tu m’as quittée dans la Phrygie, je viens te retrouver dans la Lydie ; je t’apprendrai à faire ainsi courir le guilledou à une fille de ma qualité.


hercule

Oh ! cela n’est pas honnête assurément.


argine

Je t’apprendrai à sacrifier l’héritière du devin Tirésias à une petite Reine qui te fait filer ici le chanvre et le parfait amour.


hercule

Air : Adieu panier, vendanges sont faites

Voir la partition
Informations sur cet air

Je suis bon cheval de trompettes,
Tous vos cris ne me font pas peur.
Pour vous Argine dans mon cœur
Adieu panier, vendanges sont faites.
argine

Adieu panier... Adieu panier... tu ne me feras pas bientôt des adieux si plaisants.


hercule

Eh ! de grâce laissez-moi en repos. En s’en allant.


Fin de l’air : Il faut que je file, file

Voir la partition
Informations sur cet air

Il faut que je file, file...
argine
Je te ferai filer doux.

Holà, Démons, allez présentement dans la rue Saint-Nicaise, prenez-là quelques vieux habits de Zéphyrs ; déguisez-vous et ensuite amenez ici ma rivale. C’est aujourd’hui le jour de sa naissance, Hercule n’a pas songé à lui donner un bouquet, et cela est fort impoli pour un amoureux ; je veux me charger moi de cette galanterie-là.


Scène viii

Argine, Omphale, démons déguisés en Zéphyrs

On apporte un trône de fleurs semblable à celui de l’opéra.
argine, à Omphale

Asseyez-vous là petite mijaurée ; vous êtes la reine du bal. Aux démons qui ont amené Omphale. Vous beaux masques retirez-vous, ce n’est pas encore votre tour à danser. Commençons d’abord par ensorceler ma rivale... \did Elle fait le lazzi d’enchanter Omphale. Bon, la voilà immobile, je vais l’assassiner à mon aise.


Air : Allons gai

Voir la partition
Informations sur cet air

On me hait, on l’adore,
Je frémis d’y penser\footnote Vers de l’opéra.,
Dieux ! que n’a-t-elle encore
Plus de sang à verser.

Je voudrais que l’on ne l’eût saignée de sa vie. Allons, frappons. Elle chante.


Allons gai, d’un air gai, toujours gai...

Scène ix

Argine, Omphale enchantée, Hercule

hercule, [ arrête le bras d’Argine et la désarme dans le moment qu’elle va tuer Omphale et chante :

Air : Turlututu rengaine

Voir la partition
Informations sur cet air

Turlututu rengaine, rengaine, rengaine,
Turlututu rengaine, rengaine ton couteau.
argine, avec étonnement

Air : Réveillez-vous, belle endormie

Voir la partition
Informations sur cet air

Quelles machines inconnues,
Amènent ici ce héros ?
Il faut qu’il soit tombé des nues
Pour arriver tant à propos.
hercule

Je me suis douté que vous lui feriez quelque malice.


argine

Arriver au secours d’Omphale précisément dans la minute qui allait terminer sa vie ! quelle diligence géométrique !


Argine veut reprendre son poignard, Hercule la repousse.

Air : Lon lan la derirette

Voir la partition
Informations sur cet air

Puisque tu gardes mon couteau,
Viens donc l’enfoncer dans ma peau,
hercule
Lon lan la derirette.
argine
Viens me percer...
hercule
Oh ! que nenni !
Lon lan la deriri.
argine

Oui ! tu le prends sur ce ton là ?


Air : Aux armes Camarades.

Voir la partition
Informations sur cet air

À l’aide, camarades,
Diablotins vengez-moi de ce poilou-là.
À l’aide camarades,
Enlevez sa chère Donna.
Les démons volent à la voix d’Argine.
un démon

Nous l’allons emmener dans votre calèche à six dragons.


Les démons enlèvent Omphale.
hercule

Ah ! cruelle Argine, qu’allez-vous faire ?


argine

Air : Tout comme il vous plaira larira

Voir la partition
Informations sur cet air

Tout comme il vous plaira larira ;
Tout comme il me plaira.
À deux, ensemble

Air : Morguienne de vous

Voir la partition
Informations sur cet air

Redoutez mes coups
Plus que mes paroles,
Ma fureur ne vous
Promet pas poires molles,
Morguienne de vous,
argine
Quel homme !
hercule
Quell’ femme !
Ils répètent trois fois en s’entrecoupant : \guill Quel homme ! Quelle femme !.
À deux, ensemble
Morguienne de vous.
Quel homme ! êtes-vous.
Quell’femme ! êtes-vous.

Scène x

Iphis arrive seul en tremblant

Bon, la sorcière est décampée ; ventrebleu elle m’a fait peur... Mais d’où revient Hercule ? qu’il est essoufflé !


Scène xi

Hercule, Iphis

hercule

Ô dieux ! que viens-je d’apprendre ? la Reine a déclaré à ma barbe et à celle d’Argine, que j’avais un rival heureux : cette nouvelle a tout d’un coup réjoui la sorcière, elle a donné la clef des champs à Omphale sans trop s’informer de la vérité du fait ; ma foi Argine est bien dupe !


iphis

Cela produira de nouvelles scènes.


hercule

Je t’en réponds... mais la Reine n’a peut-être dit cela que pour tromper la magicienne ; car enfin elle n’a point nommé l’objet de sa tendresse.


iphis

Voulez-vous le connaître ?


hercule

C’est tout ce que je désire.


iphis

Je vais vous enseigner un bon secret pour savoir au plus juste qui est le fripon qui vous a volé le cœur d’Omphale : priez Argine de tourner le sas.


hercule

L’expédient est infaillible ; j’en aurai le cœur net, Argine vient ici comme de cire.


iphis, voulant s’en aller de peur

Je ne veux pas vous importuner.


hercule

Non : reste, je n’ai rien de caché pour toi.


Scène xii

Hercule, Iphis, Argine

argine

Air : Je ne suis né ni roi, ni prince

Voir la partition
Informations sur cet air

Sur tes pas mon amour m’amène.
iphis

Vous avez là un amour qui vous fait bien trotter.


argine
Omphale...
hercule
Vous savez sa haine ;
Je l’en paye à gros intérêts.
Découvrez-moi l’objet qu’elle aime...
argine
C’est donc ainsi que tu la hais ?
Ah ! que ne me hais-tu de même.
hercule

De grâce, accordez-moi ce que je vous demande.


argine

Je te l’accorde à ma considération.


Air : Je reviendrai demain au soir

Voir la partition
Informations sur cet air

En faisant pour toi cet effort,
J’apprends aussi mon sort...bis

Mais je ne sais ce que je dis : mon destin ne m’est-il pas connu ? Tu m’as prouvé très évidemment que tu ne m’aimes pas, qu’ai-je encore à apprendre ?


hercule

Oh ! Madame, qui n’est bon que pour soi n’est bon à rien. Continuant le même air.


Dépêchez-vous, ne tardez pas,
argine

Soit, quoique je n’aie aucun intérêt. Achevant l’air.


Je vais tourner le sas...bis

Que cette salle devienne noire comme un jeu de paume.


Scène 13

Hercule, Omphale, Iphis, deux sorciers, un gros chat, [Argine]
argine

Air : Ô reguingué

Voir la partition
Informations sur cet air

Accourez avec le gros chat
Digne président du sabbat,
Ô reguingué, ô lon lan la,
Graissez-vous sorciers et sorcières,
Sortez, sortez de vos tanières.
Les sorciers arrivent avec le gros chat.
iphis, effrayé

Oh ! quel Rominagrobis !


argine, caressant le chat

Minet, minet, minet.


iphis

Je ne crois pas qu’il y ait un chaudronnier assez hardi pour toucher à ce minet-là.


Argine et les sorciers caressant le chat, ensemble

Minet, minet, minet.


Le chat miaule.
iphis

Voilà une conversation de gouttières.


argine, tourne le sas

Air : Les Trembleurs

Voir la partition
Informations sur cet air

Ciel ! que vois-je ? je m’égare...
Je vois l’horrible Ténare...
Ah ! je vois près du Tartare
L’ombre de mon cher papa...

Je vois, je vois...


iphis

Quand aura-t-elle tout vu ?


argine, à Hercule
Tremble ingrat, dès ce jour même,
Malgré ta colère extrême,
Avec ton rival qu’elle aime
Omphale se mariera,
Rira, rira, rira, rira, rira, rira, rira.
hercule

Qu’ai-je entendu ? Je crève dans ma peau.


argine

Et moi dans mon habit.


hercule, à Iphis

Soutiens-moi, je me trouve mal.


argine

Je me meurs.


iphis

Allons nous évanouir tous ensemble.


Iphis soutient Hercule, un Sorcier, Argine ; tous sortent avec le chat.

Scène 14

Omphale
omphale

Je ne sais pas trop comment je suis revenue dans ce temple de l’Amour, mais enfin m’y voilà.


Air : Un autre jour ma Cloris

Voir la partition
Informations sur cet air

Amour à mon amant
Va révéler ma flamme,
Vole dans ce moment,
Va régner dans son âme :
Cher Iphis mes amours,
Je t’aimerai toujours.

Air : J’entends déjà le bruit des armes

Voir la partition
Informations sur cet air

Je vais faire un vœu ridicule,
(Mon amour tout vous est permis,
Quand de ton feu notre cœur brûle,)
Sur mes appas marque deux prix,
Rabaisse-les aux yeux d’Hercule,
Et surfais-les aux yeux d’Iphis.

Offrons nos jeux à Cupidon ; puisse-t-il me rendre mon petit brunet, et écarter loin de mon royaume ce maussade Hercule avec sa sorcière. Vous, accourez bouquetières commodes, et compatissantes revendeuses à la toilette.


Air : Que je chéris mon cher voisin

Voir la partition
Informations sur cet air

Mêlez vos voix dans ce séjour
À nos doux sacrifices :
Qui pourrait mieux chanter l’amour
Que ces ambassadrices ?

Scène xv

Omphale, bouquetières, revendeuses à la toilette

On danse sur l’air d’Omphale \emph Dans un si beau jour, etc.
une revendeuse, chante le même air

Air : Dans un si beau jour


Amants malheureux, servez-vous de nous
Et vous aurez bientôt un destin plus doux.
Sans les revendeuses,
Timides galants,
Vos peines fâcheuses
Dureraient mille ans.


Amants malheureux, etc.


Par nos soin, les belles
Ont de bons hasards,
Rubans et dentelles,
Bijoux et brocards,
Et poulets près d’elles,
Trompent les renards.


Amants malheureux, etc.
omphale

Je vois Iphis.


la revendeuse

Nous nous retirons ; nous savons notre métier.


Les bouquetières et revendeuses sortent.
omphale

Oh ! pour le coup voilà une fête agréablement interrompue !


Scène xvi

Omphale, Iphis

omphale

Air : Mais surtout prenez bien garde à votre cotillon

Voir la partition
Informations sur cet air

Quoi vous voilà mon cher mignon
Je vous aime...
iphis
Est-ce tout de bon ?
omphale
Oui, je ne fais plus de façons.
iphis
Omphale prenez donc garde
À votre cotillon...bis
omphale

Air : La Serrure

Voir la partition
Informations sur cet air

C’est pour vous seul que je soupire,
Je sens croître encor mon amour
Par le plaisir de vous dire...
iphis

Fi ! c’est du verbiage que cela ; et dans le temple de l’Amour on ne doit pas s’amuser à la moutarde.


hercule, dans la coulisse

Par la tête, par la mort, par la sambleu !


omphale

J’entends Hercule ! que je crains ses jurements !


iphis, tremblant

Et moi sa massue.


Scène xvii

Omphale, Iphis, Hercule

hercule, à Omphale

C’est donc ici que vous attendez votre galant ; mais sa mort... Apercevant Iphis. eh ! te voilà !


Air : Dupont mon ami

Voir la partition
Informations sur cet air

Iphis mon ami
Par quelle aventure
Te voit-on ici ?
Je le conjecture,
C’est ta fidèle amitié
Qui de mon sort prend pitié.

Tu venais m’immoler deux amants odieux.


iphis

Cela est vrai ! malepeste ! qu’Hercule est pénétrant.


hercule

Air : Les filles de Nanterre

Voir la partition
Informations sur cet air

Oh ! quel ami fidèle !
Que j’ai fait un bon choix !
Pour le prix de ton zèle
Viens me baiser cent fois.
iphis

C’est me payer trop grassement... Hercule l’embrasse. ouf... vous m’étouffez... voilà comme vous avez embrassé monsieur Antée. Mais continuez, étouffez-moi, je ne le mérite que trop.


hercule

Air : À la façon de barbari

Voir la partition
Informations sur cet air

Que dis-tu là, mon cher enfant ?
Dieux ! n’est-ce point un songe ?
Iphis, serait-ce dans ton sang
Qu’il faut que je me plonge ?
Es-tu mon rival ? Parle donc.
iphis, pleurant
La faridondaine
La faridondon.
hercule
Ne serais-tu plus mon ami ?
iphis
Oh que si,
À la façon de barbari
Mon ami.

J’aime la Reine et j’en suis aimé ; il est temps de vous dire cela.


hercule

Ciel ! que viens-tu de me répondre ?


iphis

Air : De mon pot, je vous en réponds

Voir la partition
Informations sur cet air

Par mon trépas, je vais Seigneur
Expier mon bonheur.
Je veux me poignarder moi-même ;
De mon bras je vous en réponds,
Tirant sa batte.
Mais du poignard, non, non.
Il feint de se tuer avec sa batte.
omphale, l’arrêtant

Que faites-vous Iphis ? Elle se jette à pleines mains sur la batte.


iphis

Prenez garde de vous couper.


hercule, entrant en fureur

Air : Réveillez-vous, belle endormie

Voir la partition
Informations sur cet air

Ah ! vous tremblez donc pour sa vie ?
Ce soin irrite mes fureurs ;
Vengeons ma tendresse trahie :
Mourez, partagez mes douleurs.

Mourez, ingrats, mourez.


Hercule feint d’assommer Iphis avec sa massue.
iphis

Laissez-moi du moins faire mon testament.


hercule

Que fais-je ? Arrête, Alcide, arrête...


iphis

Oui arrête, c’est bien dit.


hercule, furieux

Air : Quand on a prononcé ce malheureux oui

Voir la partition
Informations sur cet air

Le tonnerre en grondant s’allume sur ta tête,
Tremble...
iphis
Je tremble assez.
hercule, furieux
La foudre est toute prête.
iphis, à part

Il a bien tonné aujourd’hui.


hercule, chante
Quel trouble ! quels objets à mes yeux sont offerts ?
Je crois voir Jupiter au milieu des éclairs.
iphis

Hercule a la fièvre chaude.


hercule, plus tranquille

Air : Ah ! Robin, tais-toi

Voir la partition
Informations sur cet air

Dans la fureur qui m’anime
Ah ! je t’entends dieu puissant...
Tu plaides pour cet innocent,
Montrant Iphis.
Mon cœur sera sa victime.
Jupiter, tais-toi
Tu seras, tu seras, tu seras, mon père,
Très content de moi.

Fin de l’air : Mariez, mariez, mariez-moi

Voir la partition
Informations sur cet air

Mariez, mariez, mariez-vous
Iphis, épousez Omphale,
Mariez, mariez, mariez-vous,
Je ne serai plus jaloux.
iphis

N’est-ce point raillerie ?


omphale

Ce changement n’est pas croyable !


hercule

Que voulez-vous ; il faut bien faire une fin. Mes fureurs ne ressemblent guère à celles de Roland ; il a fallu le secours de Logistile pour le guérir de sa folie, et la mienne se guérit toute seule.


iphis

Mais, si Madame Argine...


hercule

Que vous importe de savoir ce qu’elle est devenue ? elle ferait mauvaise figure ici. Lorsqu’on fera un Opéra de vos amours, Argine ne paraîtra au dénouement que dans le livre des paroles. Apercevant les commères. Allons, je vois nos voisines les fileuses qui viennent apparemment vous chercher ici, il faut leur déclarer qu’Iphis est leur Roi.


Air : Ton humeur est Catherine

Voir la partition
Informations sur cet air

Camarades filandières
Voici le Roi de ces lieux.
À Iphis.
Ne prenez pas mes manières,
Vous, cher Iphis, faites mieux.
iphis
Ne craignez pas que nos flammes
Filent dans leurs doux instants.
Avec un fuseau les dames
Ne s’amusent pas longtemps.
On danse.
vaudeville
1
Aujourd’hui de nos damerets
La tête en buvant se barbouille ;
Tandis qu’Iris boit à longs traits,
Le vin tombe en quenouille... ma foi.
Le vin tombe en quenouille.
2
Damon dort sous son domino
Tandis qu’une beauté citrouille,
Saute sans demander gano,
Le bal tombe en quenouille... ma foi.
Le bal tombe en quenouille.
3
Venus dans tes jeux pleins d’appas
Le blondin perd souvent bredouille
Et les belles n’y gagnent pas ;
L’Amour tombe en quenouille... ma foi.
L’Amour tombe en quenouille.
4
arlequin, au public
Le sexe fait pour enchanter,
Pour nous est froid comme grenouille ;
Nous voudrions pouvoir chanter,
Le goût tombe en quenouille... ma foi.
Le goût tombe en quenouille.
Fin

Theaville » Les pièces » Afficher